septembre 2019
PROCLAMATION DU FFS
29 SEPTEMBRE 1963
La résistance du peuple algérien au coup de force constitutionnel a acculé le régime à découvrir son véritable visage. Les tenants du pouvoir ont recouru aux méthodes coloniales de corruption et de menaces les plus basses et les plus odieuses afin de bâillonner et de truquer la volonté populaire. Le masque est tombé. La légende du Zaïm, du militant suprême, du super khalife a crevé comme un ballon de baudruche.
Par son abstention, encore plus massive, le peuple algérien a dit, le 15 septembre, un NON net et vigoureux au despotisme oriental et à ses instruments néofascistes.
Les deux mascarades électorales ont clarifié la situation politique et fait apparaître l’opposition d’un homme assoiffé de pouvoir aux traditions révolutionnaires et démocratiques de notre peuple, d’une minorité d’usurpateurs à la majorité des citoyens, d’un clan à la nation, d’un groupe d’inconditionnels à l’ensemble des militants, pour qui la construction du socialisme est inséparable du respect de la personne humaine, de la liberté et de l’adhésion consciente.
Le potentat règne malgré le peuple et contre le peuple, et déjà en violation flagrante de la pseudo-constitution. La torture sévit dans les locaux de la P.R.G. de la gendarmerie et de la sécurité militaire. La pseudo-constitution rejoint les serments de carrefours, les promesses de coulisses et les innombrables engagements solennels pris et trahis par Ben Bella.
Le comité central du FFS s’est réuni pendant cinq jours, sans désemparer, afin d’examiner la situation engendrée par les coups de forces perpétrés contre la légitimité populaire, le 8 et le 15 septembre, et pour dégager un programme de résistance aux complots du gouvernement contre la révolution et l’unité de notre peuple.
– considérant que l’immense désordre antirévolutionnaire, fait de gâchis financier, de favoritisme effréné et de démagogie, aggrave la crise économique et rend de plus en plus aigüe la détresse des masses déshéritées ;
-considérant que par contre, et fait édifiant, la pègre antisociale, née de la corruption et de pratique de basse police, entretenues par le système colonial, constitue, malgré la révolution, une caste consacrée dans les institutions et les hautes charges de ce régime néo- fasciste ;
-considérant que le régime, pour se consolider et gagner des clientèles a sa vocation par le chantage et la terreur, a remplacé les militants par les membres de cette pègre, et les droits imprescriptibles du citoyen par le système fasciste de faveurs, d’impunité et de maffia policières ;
-considérant que ce régime néo- fasciste est la négation tout à la fois de la révolution, de l’unité nationale et de l’État souverain au service des citoyens et sous leur contrôle ;-considérant que le deuxième gouvernement Ben Bella, par sa composition et ses structures, encore plus totalitaires, et par sa politique démagogique est un dispositif de guerre contre le peuple et ses meilleurs militants.
-considérant que la politique de répression qui s’est déjà manifestée par l’arrestation de centaines de militants, s’est aggravée au lendemain de l’escroquerie électorale par l’instauration d’un véritable climat de terreur et d’arbitraire ;
Le peuple algérien ne se laissera pas bâillonner, la révolution est l’œuvre de ses sacrifices, de sa vigilance révolutionnaire. Les conquêtes socialistes sont les conquêtes des masses populaires qui exigeront le moment venu que l’autogestion ouvrière et paysanne notamment soit sanctionnée par la Constitution ; et que l’exercice du pouvoir par le peuple soit considéré comme un acquis de la révolution, comme un fondement de notre première Constitution et non pas mentionné comme un simple « objectif à atteindre».
Toutes les valeurs toutes les élites saines, tous les citoyens et citoyennes réfléchis et sérieux, toutes les compétences dévouées font face au règne chaotique de la médiocrité, de de l’improvisation et de l’arbitraire.
Non ! À toutes les aventures d’où qu’elles puissent venir et d’abord à l’aventure qu’on nous propose.
Oui ! À une idéologie d’avant-garde non octroyée aux militants !à une plate-forme constructive et à une Constitution élaborée par la base !
À l’union de tout le peuple autour de ses élites révolutionnaires regroupées.
Considérant que par :
–La désignation unilatérale d’une assemblée nationale constituante à sa dévotion,
-Le sabotage et la mise au pas du mouvement syndical ouvrier et étudiant et de toutes les organisations nationales,
-Le coup de force constitutionnel et le truquage électoral.
Le pouvoir a fermé la porte à toute possibilité dialogue
Le comité central du FFS déclare ce pouvoir illégal.
Il décide :
De mettre en œuvre tous les moyens dont il dispose, pour arrêter net ce processus de fascisation.De mettre fin au pouvoir dictatorial et au régime personnel qui tente de s’imposer à notre pays, ordonne à ses militants d’engager, à partir de ce jour, le combat décisif, dans la discipline et le strict respect des directives.
Alger, le 29 septembre 1963
Des militants s’attendent à des mesures d’apaisement : L’appareil judiciaire accélère les poursuites
dimanche 29 septembre 2019
Les deux militants du mouvement associatif RAJ seront présentés, aujourd’hui, devant le procureur de la République près le tribunal de Sidi M’hamed à Alger pour des faits qui ne sont pas encore connus. Il s’agit en l’occurrence de Ahcene Kadi et Karim Boutata, arrêtés jeudi à Alger, par des agents civils et conduits vers la brigade de Bab Edjdid. A Constantine, les jeunes Amazigh Semmani et Ameziane Tenfiche seront présentés, mercredi prochain, devant le tribunal correctionnel de Constantine. Ils sont poursuivis pour « atteinte à l’unité nationale » et exhibition du drapeau amazigh. Un acte énoncé dans l’article 79 du code pénal qui concerne en principe des actes graves comme l’espionnage ou le terrorisme et non l’exhibition d’un étendard identitaire.
Depuis plusieurs semaines, des activistes sont arrêtés pour leur «engagement politique » et des citoyens lambda pour avoir pris part aux marches hebdomadaires des vendredis. Selon des témoins oculaires, une vingtaine de manifestants ont été embarqués dans la capitale lors du 32e acte de mobilisation populaire, alors que le chef de l’Etat, Abdelkader Bensalah, a promis d’appliquer des mesures d’apaisement consistant principalement dans le départ du gouvernement Bedoui, la libération des détenus d’opinions, ainsi que la levée du «blocus policier» sur Alger, et la fin de la répression contre les manifestants.
Ces arrestations sont qualifiées par la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme « d’atteinte grave aux libertés démocratiques et à l’exercice de l’action politique ».
Après leurs interpellations, les prévenus présentés devant le Procureur ou le juge d’instruction sont placés de prime à bord en détention préventive. C’est pour ces raisons que les avocats dénoncent constamment, depuis la multiplication des arrestations, l’ordonnance de « détention préventive » prononcée « systématiquement » à laquelle recourent souvent les juges d’instruction et les procureurs, sachant que dans le code de procédure pénale, cette mesure est une « exception, mais qui tend à devenir la règle », dénoncent les robes noires.
Récemment, le militant des droits de l’Homme, Salah Eddine Sidhoum, a indiqué que 92 personnes sont poursuivies en justice en raison de leur engagement politique en faveur du Hirak, dont une quarantaine attend une date de leur procès, sachant que nombre d’entre eux n’ont pas encore été entendus dans le fonds. Ce dernier ajoute également que les chefs d’inculpations varient entre « atteinte aux corps constitués, atteinte à l’unité nationale et atteinte au moral de l’Armée, attroupement ou incitation à l’attroupement». Les avocats mettent en avant « l’illégalité » des poursuites engagées contre des manifestants pacifistes et dénoncent avec fermeté « un appareil judiciaire fonctionnant aux injonctions ».
Pour eux, il suffit de constater les différents verdicts prononcés à l’encontre des porteurs de drapeau berbère. Pour une infraction « fictive », les tribunaux de Batna, Mostaganem et Annaba ont acquitté les manifestants arrêtés pour délit de déploiement de l’étendard berbère, alors que celui d’Alger ne fait que prolonger le séjour carcéral d’une quarantaine de prévenus, arrêtés pour même délit.
Le syndrome MBS souffle sur Damas
Tensions au cœur du pouvoir syrien · Le syndrome MBS plane-t-il donc sur Damas ? La question est sur toutes les lèvres en ce début d’automne à propos du sort réservé au richissime Rami Makhlouf, cousin germain personnellement très proche de Bachar al-Assad, soutien indéfectible du régime, et dont la puissance fait dire que toute la Syrie appartient au clan Assad-Makhlouf. Or, la fortune de ce milliardaire — dont les intérêts vont de la téléphonie aux travaux publics en passant par le tourisme et le soutien aux milices pro-régime — paraît dans le collimateur du pouvoir.
Conflits > Économie > Henri Mamarbachi > 27 septembre 2019
https://orientxxi.info
Où est donc passé Rami Makhlouf, et qu’en est-il de la fortune de cet homme qui possède notamment le principal opérateur de téléphonie mobile, Syriatel ? Et qu’en est-il d’autres puissants hommes d’affaires qui seraient également visés ? Si cet épisode est avéré (mais le silence officiel ne fait qu’alimenter le mystère), il rappellera la grande purge opérée en 2018 en Arabie saoudite, lorsque l’héritier du trône et homme fort du royaume, Mohamed Ben Salman (MBS) fit détenir dans un luxueux hôtel quelques VIP avant de les libérer contre des sommes colossales dans une sorte de mise en scène anticorruption.
La comparaison peut paraître fortement exagérée. Le royaume du désert, riche de son pétrole et pro-occidental n’a rien en commun avec la Syrie « socialiste » de Bachar Al-Assad, proche de Téhéran et de Moscou et actuellement ruinée par une guerre civile sans merci de huit ans. Sauf par l’autoritarisme qui les caractérise, et un goût inhérent du secret propre aux dictatures qui font que la compréhension de ce qui se passe réellement relève du casse-tête.
Concurrence entre Moscou et Téhéran
Tel est le cas en Syrie où des événements troublants semblent en cours sans la moindre explication jusque là de la part des autorités, et qui touchent au cœur du pouvoir. Une situation inédite depuis le début du confit en 2011, voire avant.
En apparence, tout paraît « normal » sur les bords du Barada — si l’on peut utiliser ce terme dans un pays où rien ne l’est. La population survit, les pauvres sont toujours plus misérables, et les gros commerçants voguent au gré du cours de change du dollar qui joue quotidiennement au yoyo. La reconstruction n’a pas l’air d’être pour demain.
Moscou et Téhéran ont quasiment la mainmise sur le pays, du moins la quasi-totalité des zones « libérées » avec leur concours par le régime. Mais Iraniens et Russes ont clairement des desseins différents en Syrie, avec force alliés, chefs de milices, hommes d’affaires, alliances avec tel ou tel homme fort au sein du pouvoir ou gravitant autour de lui. Dans ce contexte, Bachar Al-Assad, même s’il reste maître du pays, doit se battre contre tout adversaire, réel ou imaginé, actuel ou futur. De son côté, son cousin Rami disait au début de l’insurrection : « Personne ne peut garantir ce qui se produira si quelque chose arrive à ce régime », et qu’il se battrait « jusqu’au bout ».
Des rumeurs, encore des rumeurs
« Tout a commencé… par des rumeurs ! », raconte Jihad Yazigi, directeur de la très sérieuse revue économique Syria Report, publiée hors de la Syrie. « Depuis le mardi 27 août, Damas bruisse de rumeurs sur une opération menée par Bachar Al-Assad visant Rami Makhlouf, une action qui, si elle était confirmée marquerait un changement significatif au sein du pouvoir syrien », écrit-il.
« Ainsi, au cours des derniers jours, plusieurs média et réseaux sociaux pro-régime et de l’opposition ont indiqué que Rami Makhlouf, cousin maternel de Bachar, a été mis en résidence surveillée et ses sociétés mises sous séquestre », selon la revue datée du 28 août, qui ajoute que d’autres informations faisant état de rumeurs, très difficiles à vérifier à ce stade, selon lesquelles les deux frères de Rami, Iyad et Ihab, qui travaillent avec lui, sont également assignés à domicile, tandis que d’autres indiquent que 29 hommes d’affaires sont aussi en état d’arrestation.
Une autre source indépendante a indiqué à Orient XXI qu’un « responsable de la sûreté présidentielle a été assigné à la direction de Syriatel (…) et que des mesures ont également visé d’autres intérêts contrôlés par le cousin maternel, dont notamment l’ONG Al-Boustan Association (ABA), qui outre ses activités dans le domaine caritatif, recouvre des liens avec des milices liées au pouvoir qu’elle finance. Une autre société “vache à lait” de M. Makhlouf, opérant sous le nom de Ramak, contrôle les zones franches ». Toutes ces sociétés constituent une pléiade aux ramifications industrialo-militaires. Elles sont visées depuis des années par les sanctions européennes et américaines, de même que leur patron Rami Makhlouf et d’autres hommes d’affaires liés au régime.
Selon la version la plus répandue, c’est la Russie qui aurait demandé à Assad le remboursement de 2 milliards de dollars (1,83 milliard d’euros), ce que ce dernier a réclamé à son tour à son cousin qui le lui a refusé, engendrant la crise actuelle. D’autres, plus ou moins crédibles, font valoir que cette campagne d’arrestations entre dans le cadre d’une « lutte contre la corruption » qui mine l’État et l’économie du pays. À voir pour y croire…
Pour ne pas simplifier les choses, Makhlouf est perçu comme proche de Téhéran dans ce nœud d’alliances et de contre-alliances visant également le contrôle de la communauté alaouite au pouvoir. Assad cherche de son côté à renforcer la tutelle de l’État (et donc de son pouvoir), et à réorganiser l’armée en y intégrant toutes les milices qui obéissent à tel ou tel chef militaire et sont sous l’influence de telle ou telle puissance étrangère.
Une famille au sommet de l’État
Quelle que soit la réalité dans ce système opaque – et il est certain qu’il se passe des choses — il reste des interrogations. « Même si l’hypothèse de la demande russe est plausible bien que j’en doute, elle n’explique pas tout. Pour commencer, les relations entre Bachar et son cousin sont anciennes. Ils sont amis et très proches, et se sont rendus mutuellement de multiples services. De plus, Mohamad Makhlouf, le père de Rami, est le ciment ou le “parrain” de la famille avec sa sœur Anisa [épouse de Hafez Al-Assad]. Il a toujours eu une grande influence sur son neveu, avant même qu’il soit devenu président en 2000. Et Bachar a offert Syriatel à son cousin au lendemain de son arrivée au pouvoir », nous explique Jihad Yazigi. Sans oublier que les Makhlouf ont un rang social plus élevé que les Assad au sein de la communauté alaouite qui compte pour environ 10 % de la population syrienne et détient le pouvoir depuis un demi-siècle. Pour rester dans les affaires de famille, Maher Al-Assad, le discret homme fort du régime, frère du chef de l’État et commandant de la redoutable 4e division blindée de l’armée, est réputé ne guère apprécier son cousin Rami Makhlouf.
Un éventuel conflit au sein du clan Makhlouf-Assad serait ainsi lourd de conséquences tant les intérêts sont liés, mais pas nécessairement toujours convergents dans cette famille où le militaire, le financier, le tribal s’entrecroisent, sans parler des ambitions. Le cœur du régime serait ainsi touché. Mais qu’en sera-t-il dans la réalité ? Il est trop tôt pour le savoir.
Certes, le régime a connu d’autres « déboires » pour utiliser un euphémisme. Des chefs militaires se sont « suicidés », et le beau-frère de Bachar Al-Assad (époux de sa sœur Bouchra), le général Assef Chawkat, ancien chef des renseignements militaires, est parti en fumée dans une explosion à la bombe lors d’une importante réunion à Damas en juillet 2012. De très hauts responsables ont été poussés à l’exil. Mais le pouvoir semble survivre à ses commotions, voire souvent en tirer parti.
La chute de la livre
Dans le sillage de ces rumeurs, la monnaie syrienne qui n’est plus que l’ombre d’elle même a trinqué… et les commerçants avec. Alors que le dollar valait autour de 500 livres syriennes (LS) au début de l’année, signe d’une relative stabilisation de la livre après les batailles gagnées par le régime, la devise américaine flirtait avec les 700 LS début septembre, un niveau inégalé depuis le début du conflit, avant de se stabiliser aux alentours de 635 LS. Depuis le début de l’année, le billet vert a en gros gagné quelque 30 % sans que personne ne sache quelle sera la prochaine étape. Mais le plongeon de la fin août-début septembre en a affolé certains qui se sont interrogés sur les dommages causés par les spéculations autour de la situation politique.
« Je plains les commerçants qui doivent importer des biens de l’étranger. Nul n’est épargné sinon peut-être les spéculateurs et certains cambistes qui opèrent sur le marché noir », dit un homme d’affaires syrien lourdement touché, et qui a dû lui aussi aussi augmenter le prix de vente de ses produits sur le marché local.
À la veille du conflit, le dollar valait autour de 50 LS. Depuis, comme d’autres pays en situation de conflit ou d’instabilité politique, la Syrie a vu ses réserves de change s’évaporer. Estimées à quelque 20 milliards de dollars (18,3 milliards d’euros) avant le début du conflit, elles seraient tombées à moins d’un milliard, mais il ne fait pas de doute que les moyens de la Banque centrale de soutenir la livre en intervenant sur le marché sont minimes. Tout récemment, la Banque centrale a donné des instructions aux banques commerciales de limiter leurs crédits à leur clientèle.
La chute brutale de la devise syrienne est également attribuée par certains experts à la crise de liquidités dans le secteur bancaire libanais où de nombreux importateurs syriens opèrent, accentuant la demande en dollars. Or la livre libanaise est elle même sous pression depuis des mois en raison de la situation politique interne et de la détérioration de la balance des paiements de ce pays voisin qui accueille environ un million de réfugiés (sans parler des réfugiés palestiniens).
Même si le régime a incontestablement remporté des succès sur le terrain, sa stabilisation est loin d’être assurée.
Henri Mamarbachi Ancien journaliste de l’Agence France presse (AFP).
MIS EN LIGNE LE 25/09/2019 À 18:14
PAR BAUDOUIN LOOS
Le Soir.be
D’anciens hauts responsables du régime algérien, dont des militaires qui eurent naguère tout le pouvoir en main, ont été condamnés. Mais le « système » tient bon.
La scène se passe en pleine nuit à Blida, à 50 km au sud d’Alger. Le tribunal militaire juge une poignée d’hommes et une femme. Accusation : « atteinte à l’autorité de l’armée » et « complot contre l’autorité de l’Etat ». Des médias avaient annoncé « le procès du siècle ». Mais seuls quelques proches et les avocats ont pu assister aux débats, qui n’ont duré que deux jours. Le président de la cour énonce la sentence : condamnés à 20 ans de prison, l’ex-général Khaled Nezzar (en exil) et son fils Lotfi ; condamnés à 15 ans, l’ex-général Mohamed Mediene dit « Toufik », le général Athmane Tartag, Saïd Bouteflika, frère et ex-conseiller du président déchu, et enfin Louisa Hanoune, secrétaire générale du Parti des travailleurs.
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Les généraux en cause ont régné – officieusement – sur l’Algérie pendant des lustres. Deux d’entre eux, Nezzar et « Toufik », faisaient partie du quarteron de généraux « janviéristes » qui a perpétré le coup d’Etat militaire de janvier 1992 qui précipita l’Algérie dans une « sale guerre » qui allait faire entre 150.000 et 200.000 morts. « Toufik » est resté grand maître des tout-puissants services secrets algériens jusqu’en 2015 avant d’être écarté par le clan Bouteflika et remplacé par Tartag, lui aussi condamné mardi. Quant à Saïd Bouteflika, il était devenu l’homme de l’ombre le plus influent du pays depuis l’AVC qui, en 2013, avait frappé Abdelaziz, son frère président. Louisa Hanoune, elle, avait courageusement combattu les « janviéristes » dans les années 90 avant, hélas ! de rentrer dans le rang sous l’ère des Bouteflika.
« Règlement de comptes »
Pourquoi ces condamnations ? Rien à voir avec les années 90, la répression, la corruption ou autres délits gravissimes. Un homme – un général une fois de plus, nous sommes bien en Algérie – poursuit les accusés de sa vindicte. Ahmed Gaïd-Salah vice-ministre de la Défense, chef d’état-major et, surtout homme fort du régime depuis l’éviction du clan Bouteflika suscitée par l’incroyable contestation du peuple depuis le 22 février. Certes, il doit tout à « Boutef », qui l’a nommé là où se trouve. Mais voilà, ces accusés avaient, selon lui, tenté de fomenter un complot pour le défenestrer.
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Le procès de Blida n’est donc qu’« un vulgaire règlement de comptes entre gangs de l’oligarchie militaro-financière », comme nous dit d’Alger le docteur et opposant radical Salah-Eddine Sidhoum. Un avis validé à Paris par Kamel Cheklat, chercheur au Centre de recherches sociologiques et politiques : « C’est un procès à huis clos tenu par le système contre des éléments du système pour préserver l’essentiel, la cohésion du groupe, et consolider le régime. Une façon de dire : voilà ce qui arrive à ceux qui n’épousent pas la démarche de l’état-major ou celui qui complote contre l’armée et d’abord contre Gaïd-Salah ».
Tous les vendredis depuis sept mois, les Algériens marchent dans les rues contre ce système, mais le régime opaque qui les gouverne ne veut pas s’en aller. Tout juste sacrifie-t-il çà et là quelques têtes…
Alors que les Algériens sont une fois de plus descendus dans la rue pour le 32e vendredi consécutif, les militants les plus en vue sont désormais arrêtés.
Par Philippe MartinatLe 27 septembre 2019 à 19h01
http://www.leparisien.fr
Refermer à tout prix le couvercle sur le mouvement populaire. Telle est désormais la stratégie ouvertement assumée de l’homme fort d’Alger, le chef d’état-major et vice-ministre de la Défense, Ahmed Gaïd Salah.
Jeudi, à la veille du 32e vendredi de mobilisation contre le pouvoir pour exiger un passage à une véritable démocratie, le général a encore durci le ton en avertissant ceux qui « font obstacle, sous quelque forme que ce soit » aux élections présidentielles prévues pour le 12 décembre qu’ils s’exposent à une « sanction juste et rigoureuse, voire dissuasive ».
La semaine précédente, il avait interdit aux Algériens résidant à l’extérieur d’Alger de venir manifester dans la capitale, provoquant de gros embouteillages à l’entrée de la ville. « Même des ambulances avec leurs malades sont restées coincées pendant des heures et sous le soleil brûlant », témoigne un manifestant.
Des dizaines de militants emprisonnés
Malgré ces mesures dissuasives, des centaines de milliers d’Algériens ont défilé dans les rues ce vendredi comme il y a une semaine, très remontés notamment par la mise en place par Gaïd Salah d’un calendrier électoral devant conduire à des élections présidentielles le 12 décembre. Sur les pancartes brandies par les opposants on pouvait lire : « Pas d’élections avec la mafia ».
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Gaïd Salah, qui a reçu le soutien de Moscou, accentue aussi la répression, appuyé par une justice visiblement aux ordres. Un à un les militants les plus en vue sont arrêtés dans la rue ou à leur domicile par des policiers en civil.
Karim Boutata et Ahcene Kadi, deux dirigeants du RAJ (Rassemblement Action Jeunesse), une association très active dans le mouvement, ont ainsi été appréhendés jeudi par des hommes en civil se présentant comme policiers. Nul ne sait à ce jour où ils se trouvent.
Arrêté le 16 septembre, Samir Benlarbi, une des figures du mouvement, est accusé d’« atteinte à corps constitué » et d’« atteinte à l’institution militaire ». Il a été maintenu en détention par la chambre d’accusation de la Cour d’Alger sans que ses avocats n’aient été avertis de l’audience, indique le site ObservAlgerie.Newsletter – L’essentiel de l’actuChaque matin, l’actualité vue par Le ParisienJE M’INSCRISVotre adresse mail est collectée par Le Parisien pour vous permettre de recevoir nos actualités et offres commerciales. En savoir plus
Karim Tabbou, ancien premier secrétaire du Front des forces socialistes (FFS) et fondateur de l’UDS (Union démocratique et sociale, non autorisé), incarcéré pour « atteinte au moral de l’armée » a été brièvement remis en liberté conditionnelle jeudi avant d’être à nouveau arrêté à son domicile. Des dizaines d’autres militants sont emprisonnés, parfois dans des conditions dramatiques. C’est le cas de Bilal Ziane qui s’est vu refuser par le juge de Sidi M’hamed une remise en liberté alors qu’il doit suivre une chimiothérapie.
La presse internationale tenue à distance
C’est devant le tribunal militaire de Blida, et à huis clos, que Gaïd Salah a fait juger et condamner cette semaine à d es peines de prison de 15 à 20 ans Saïd Bouteflika, le frère de l’ancien président écarté en février, et les deux anciens responsables du renseignement. « C’est une manière pour Gaïd Salah de montrer sa force tout en mettant hors d’état de nuire des gens avec lesquels il a partagé le pouvoir pendant vingt ans », commente Hakim Addad, fondateur du RAJ.
Le chef d’état-major algérien prend également soin de tenir à distance la presse internationale. Plus aucune demande de visa n’est actuellement accordée à la presse française. Même les communications avec les correspondants locaux sont parfois subitement interrompues par un message qui signale que « le numéro n’est pas attribué »…
Nul ne sait pour l’instant jusqu’où le pouvoir algérien a l’intention d’aller pour museler le mouvement de résistance populaire qui reste, lui, pacifique.
- Nadjib Belhimer Journaliste
https://www.huffpostmaghreb.com
Sept mois de révolution pacifique n’ont pas suffit aux élites pour prendre la mesure de ce qui se passe. Les dirigeants des partis continuent d’emprunter leur discours de l’ère révolue d’avant le 22 février et “l’intellectuel sage” et “l’expert pondéré” continuent de prodiguer des leçons en pragmatisme et en réalisme; et aussi d’analyser les slogans des manifestants pour les imputer à des parties invisibles tirant les fils et fixant une ordre de route à partir de chambres obscures. Pour ceux-là, rien n’a changé.
La partie électorale qui commence dessine déjà une scène déprimante pour ceux qui annonçaient que la solution magique viendrait des urnes. Les noms des candidats en course annihilent toutes les garanties censées avoir été apportées par l’Autorité chargée d’organiser les élections et la révision de la loi électorale.
Depuis que Abdelmadjid Tebboune a osé se présenter comme le sauveur de l’Algérie en proposant d’offrir ses précieux services pour la construction du nouvel Etat algérien, les défenseurs de l’élection commencent à exprimer franchement leur déception.
Que ce soit pour l’autre candidat, Ali Benflis, qui a vu dans l’apparition de Tebboune un projet de cinquième mandat, ou pour certains défenseurs enthousiastes de la solution électorale, les garanties se sont soudain évaporées et l’intention d’imposer un candidat est devenu plus évidente.
Des partis hors du coup
Cette déception précoce confirme qu’ils ont une vision à courte-vue et qu’ils n’ont pas pas assimilé la portée du moment historique que constitue la révolution pacifique. Il faut rappeler que l’attachement du pouvoir à faire des élections la priorité et l’objectif a été soutenu par des partis présumés être dans la case de “l’opposition”. Cela est apparu clairement les jours qui ont suivis le début des manifestations, le 22 février.
Les partis ont continué à se comporter avec la logique d’avant la révolution. Ils ont cru que les revendications avancées lors de la conférence de Mazafran, notamment celles relatives à la révision de la loi électorale et la création d’une commission électorale indépendante, sont des acquis importants pouvant garantir l’ouverture du champ à l’alternance pacifique au pouvoir.
La précipitation à soulever à nouveau ces revendications immédiatement après le 22 février était le signe clair d’une incompréhension de ce qui se passait dans la rue dont ils attendaient une fin rapide. On peut comprendre une erreur d’appréciation initiale.
Sept mois dans la vie de la révolution pacifique n’ont pas suffit aux élites pour comprendre ce qui se passe. Les chefs de partis continuent d’emprunter leurs discours une évaluation erronée alors que la révolution pacifique a réussi à éviter tout les pièges qui lui étaient tendus. Ceci confirme que ces partis ne sont pas habilités à être partie prenante dans le projet de l’Algérie nouvelle.
Le pouvoir a tiré un grand bénéfice du service rendu par certains partis d’opposition qui ont réduit la question du changement de régime aux élections. Une option qui a été imposée à travers la diabolisation de la transition démocratique présentée comme une transition vers le vide, tout comme l’idée d’un processus constituant a été décrite comme une entreprise de destruction de l’Etat.
Dénaturation
Des partis ont contribué à cette dénaturation. Ils l’ont justifiée au plan idéologique ainsi que le montrent les discours du MSP et, à un degré moindre, de certains autres partis islamistes. Que ce soit pour les réunions des “forces du changement” ou de la conférence de Ain Benian, ceux qui se sont présentés comme des opposants étaient pressés d’aller aux élections le plus tôt possible. Ils se sont soumis à la décision du pouvoir de différer la satisfaction des revendications du peuple à un président élu dans le cadre d’un régime qu’il veut changer, ainsi que le confirme le discours officiel.
Il n’y a eu aucune surprise, le pouvoir a pris les revendications de cette “opposition”, les a imputées au peuple, les a vidées de leur contenu avant de les présenter, de la manière que nous savons, comme étant une réponse aux exigences du peuple. Et que donc, il ne reste plus qu’à aller aux urnes le 12 décembre.
Le pouvoir qui avait été mis dans l’impasse par la révolution pacifique était, selon la vision de cette opposition, en position de force. Abdelaziz Rahabi, par exemple, a reconnu que les concessions faites à un pouvoir qui n’a montré aucun signe d’écoute était une erreur. Mais, mis à part le refus de Rahabi de participer aux élections, on ne voit rien qui indique que l’on a pris la mesure de l’erreur et que l’on oeuvre à faire les corrections nécessaires.
Le pouvoir est-il si fort qu’ils le croient ?
Les visions des partis, et d’une partie de l’élite qui s’est placée du côté de la révolution pacifique, se fondent sur un réalisme tronqué. Ils avancent une série d’arguments pour justifier à leur position “souple” qui va dans le sens des promesses du pouvoir. Ils ont fait valoir que face à une société inorganisée du fait de la désertification politique, il y a un pouvoir qui dispose des tous les attributs de la force.
L’autre argument est la possibilité d’un reflux des manifestations avec le temps. Toutes ces justifications ont conduit à des appels à s’engager plus fortement dans le contrôle de l’opération électorale et à présenter un candidat consensuel unique de l’opposition. Le changement, selon eux, ne venant que par vagues, il est possible de construire à partir de ce qui a été réalisé dans cette première vague.
Ces visions se fondent sur une lecture erronée de la force du pouvoir. Il faut d’abord distinguer entre les facteurs de force qui se manifestent dans la puissance matérielle (la plus importante étant la force de répression qui peut être utilisée par le pouvoir au nom de la légitimité de l’Etat), l’existence de réseaux d’allégeance organisés, la puissance de l’argent (la capacité à utiliser l’argent public pour corrompre la société), la monopolisation des médias et de la justice. Tout cela sont des facteurs de force du pouvoir.
Mais la force réside dans la capacité à utiliser ces éléments pour atteindre des objectifs précis. Là, réside, la nouveauté induite par la révolution pacifique du 22 février. Les manifestants, par leur détermination à rester pacifiques, ont neutralisé la carte de la répression et privé le pouvoir du principal instrument auquel il avait recours par le passé. En outre, la pression populaire a déjoué les plans visant à assurer paisiblement la continuité. L’incarcération de hauts responsables sous l’accusation de corruption a ouvert la voie à des poursuites judiciaires qui ont compliqué les opérations d’utilisation de l’argent public.
La prise de distance à l’égard de Bouteflika a imposé des tentatives de changement dans les directions des partis et des organisations qui ont été utilisés durant le règne du président déchu. Une situation qui a créé de la confusion au sein de pouvoir rendant difficile le recours aux réseaux traditionnels alors qu’il n’a pas d’autres alternatives. Sans compter que l’unicité imposée à l’information dans tous les médias lourds a considérablement affaibli leur capacité à influencer.
Un étrange déni
L’état de confusion dans lequel se trouve le pouvoir actuel réside en partie dans l’incapacité à exploiter ces facteurs et à les transformer en force effective. Les élites, au lieu de prendre conscience de ces faits, persistent à imputer tout ce qui est arrivé aux décisions prises par le pouvoir de fait. C’est un déni étrange du rôle de la révolution pacifique dans la désagrégation du régime en poussant ses clans à s’affronter loin d’une rue sanctuarisée par son pacifisme.
Certes, la révolution pacifique a été la surprise de l’Algérie pour elle-même, mais sept mois sont largement suffisants pour que les “élites” corrigent leur lecture de la réalité et se débarrassent de leur vision hautaine à l’égard de la rue. Suffisants pour voir que les manifestations qui se poursuivent avec force et que la détermination à aller vers un changement réel de régime signifient en définitive qu’il y a eu un changement radical dans les rapports de force. Et cela implique une révision radicale des stratégies politiques afin que ces “élites” soient à même de prendre la mesure de ce moment historique et de participer à la construction de l’Algérie nouvelle.
Traduit de l’arabe par le HuffPost Algérie. Article original
Episode 3 :Retour de la clownerie électorale en Algérie dès l’annonce de l’élection présidentielle le 12 décembre 2019.
Le feuilleton algérien de l’élection
présidentielle se poursuit avec la projection bientôt du troisième
épisode. Le casting des acteurs des candidats à l’élection présidentielle
a commencé le 22 septembre 2019 et après seulement 03 jours depuis le début,
plus de 50 citoyens ont retirés les 50 000 formulaires pour prétendre jouer le
rôle du futur président de la République. Le Cinéma invraisemblable auquel
nous assistons lors du retrait de ces documents, nous laisse ébahi. Le
peuple, est-il si débile que ça pour entendre les âneries de ces pauvres
candidats, qui ne sont même pas des lièvres et pourquoi l’état les laisse
faire. Tout cela n’est pas innocent. Voir ce cinéma avec la complicité des
responsables, pousse de plus en plus de citoyens à s’abstenir de tout acte
politique et des jeunes à quitter le pays par tous les moyens au risque de leur
vie. Pour moi les débiles ce n’est ni le peuple, ni ces pitres, mais les
décideurs qui ne veulent pas comprendre qu’ils sont dépassés et déconnectés de
la réalité algérienne. Utiliser des inconnus, sans niveau ni expérience
politique et les présenter au peuple comme futurs prétendants à la présidence
en les ridiculisant de la sorte et en les montrant transporter les formulaires
dans des voitures et des camions, prouve une fois de plus que les décideurs ne
veulent pas changer et continuent dans leur aveuglement. Ils ont réussi
par cette méthode de ne donner aucune crédibilité aux élections et à la
présidentielle particulièrement. Beaucoup de citoyens ne croient pas ce
qu’ils sont en train de vivre et de voir, dès l’annonce de l’élection
présidentielle imposée du 12 décembre 2019, c’est une véritable insulte à
l’intelligence de tous les Algériens. Ce cinéma est le pire scénario
auquel les Algériens pouvaient s’attendre. Personne ne pourra croire que
ces pitres prétendants à la présidence l’ont fait de leur propre gré, mais cela
ne nous surprend pas, car nous l’avons déjà vécu dans les précédents
épisodes. Et cela, nous prouve que rien n’a changé et que le pouvoir est
resté en place et applique la même politique. Le pouvoir continue sa fuite
en avant et risque de conduire le pays dans une impasse qui compliquera encore
plus notre sortie de crise, s’il persiste à s’entêter. Faute de candidats
crédibles, le pouvoir en place est en train de nous présenter de véritables
clowns débiles ou des hommes du pouvoir, n’ayant plus aucune popularité comme
futurs candidats à l’élection présidentielle. Sommes-nous tombés si bas
pour ne plus tenir compte du peuple dans la rue ?
Je ne pense pas, car à l’analyse des deux
premiers épisodes des questions sans réponses, commencent à conforter notre
inquiétude sur notre révolution spontanée. Beaucoup de variables, nous
montrent que ce schéma a été tracé, dès la fin du cinquième mandat, mais avec
une seule ne nuance pas de solution transitoire. Allons-nous vers une nouvelle
république ? Ou tout simplement, on a participé à aider un clan du pouvoir
à chasser un autre, car ni la méthode, ni les têtes n’ont changé. L’histoire
nous donnera la réponse car nous ne pouvons rien avancer car pour le moment
nous ne détenons aucun tenant.
Pour le moment, résumons d’abord les deux
premiers épisodes, que le peuple a rejetés et réfléchissons surtout sur le
premier épisode, qui aujourd’hui semble le plus adapter pour sortir de la crise
en faisant de simples retouches. Chacun de nous aujourd’hui est conscient
que si on prend comme base, les propositions du 11 mars 2019 et en engageant de
vraies négociations, le chemin aurait été très court pour aller à l’élection
présidentielle et qu’aujourd’hui nous serions prêt à élire notre président.
Allons aux épisodes du feuilleton : « Élection
présidentielle en Algérie ».
.
Épisode 1 : 18 avril 2019 ou cinquième
mandat.
À l’annonce du cinquième mandat, tout le peuple
algérien est sorti pacifiquement dans la rue pour dire non à cette
mascarade. C’était le début de la révolution pacifique, le 22 février
2019. Après le troisième vendredi du 08 mars 2019 où plus de 25 millions
d’Algériens manifestèrent, Bouteflika, renonce à l’élection et adresse le lundi
11 mars 2019 un message au peuple algérien. En voici les principales
annonces :
– le président Bouteflika ne briguera pas
de cinquième mandat.
– les élections présidentielles prévues le
18 avril sont reportées
– « des changements importants au sein
du gouvernement » (non précisés) sont annoncés.
– une période de transition s’ouvre, au
cours de laquelle une « Conférence nationale inclusive et
indépendante », censée représenter toutes les sensibilités de la société
algérienne, sera chargée d’élaborer une nouvelle Constitution, en principe
avant la fin de 2019.
– cette nouvelle Constitution sera soumise
à un référendum.
– une élection présidentielle aura lieu
dans le prolongement de la Conférence nationale inclusive, à une date non
déterminée.
Ces décisions sont fortes, mais le peuple refuse
cette solution, car il n’a pas confiance, en la mafia qui continuera à
gouverner et qui se chargera de faire cette transition. Il voit là, un nouveau
scénario, organisé par le gouvernement en place et le pouvoir mafieux, pour
calmer le mouvement populaire du 22 février 2019. Aujourd’hui, les choses
sont claires, ce n’est pas uniquement le peuple qui a refusé cette solution de
sortie de crise, mais aussi une partie qui a vu ses intérêts et son avenir en
danger et c’est ainsi que le mouvement populaire a continué jusqu’à ce jour
sans jamais revoir la première feuille de route proposée.
Les élections, prévues initialement le 18 avril,
sont reportées pour le 04 juillet 2019. Le peuple, a-t-il eue raison ou
non, on ne le saura jamais. Mais une chose est sure, les propositions
faites à ce moment étaient les solutions pour basculer vers la nouvelle
république. Le seul hic dans cette feuille de route pour moi, fut qui
veillera à garantir cette transition, car un pouvoir maffieux qui a conduit le
pays au bord de la faillite, ne peut que faire échouer toute solution, qui
pourrait les condamner. Aujourd’hui on est très loin de ces propositions.
Avons-nous été égoïstes ? Là aussi nous ne pouvons pas donner de réponses.
Épisode 2 : 04 juillet 2019.
L’annonce de la date du 04 juillet 2019, fut une
véritable déclaration de guerre au peuple, non pas à cause de l’élection que
personne ne refuse, mais car une grande partie des figures de l’ancien système
était toujours au pouvoir, et s’apprêtait à de nouveau organiser l’élection
avec la même administration avec les mêmes méthodes que tout le monde connait,
lesquels ont conduit le peuple à ne plus faire confiance. L’annonce de la
date du 04 juillet 2019, nous a fait oublier les propositions de sortie de crise
à cause de certains groupuscules qui se sont former partout pour discuter
d’autres solutions autre que la feuille de route proposée. Ce qui a fait le
bonheur du pouvoir en place qui arriva même à placer ses hommes dans ces
groupuscules. Et plus le temps passé, plus l’ancien système, se régénérer. Depuis
l’indépendance, nous avons assisté à des mascarades de tous genres, des
promesses sans lendemain et une démocratie qui a été avortée à maintes reprises
justement grâce à l’appui des mêmes stratagèmes. Les Algériens qui battent
le pavé depuis le 22 février pour un changement radical du système politique en
place exigent, avant d’aller vers une élection présidentielle, le départ, sans
aucune exception, des personnages-clés de Bouteflika et réclament des institutions
légitimes pour construire une Algérie nouvelle et le changement des règles de
jeu.
La barre est placée haut, et seule une négociation sérieuse, peut nous mener vers une élection présidentielle libre et démocratique avec un taux de participation de plus de 70 %. Apparemment, le pouvoir continue à rester autiste alors que la solution existe et que seule une feuille de route, sortie des négociations avec les vrais représentants du peuple, peut nous faire sortir de la crise et conduire le pays à de meilleurs jours. L’entêtement du pouvoir dans cette logique et de revoir sa copie, a fait échouer l’élection du 04 juillet 2019. La question majeure posée, est : pourquoi le pouvoir est sortie de sa feuille de route qui est aujourd’hui opposée à celle du 11 mars 2019 car l’annonce brutale de l’élection présidentielle du 12 décembre 2019, annule toutes les propositions précédentes en faveur du peuple.
Episode 3 : 12 décembre 2019
L’annonce de la date de l’élection
présidentielle, le 12 décembre 2019 a entraîné de nombreuses réactions sur les
réseaux sociaux. Loin de calmer les esprits, elle a été vécue comme une
provocation, renforçant les appels à se mobiliser pour le 31e vendredi et mardi
consécutif.
Mais pour les constitutionnalistes, le report
d’une élection présidentielle pour la troisième fois en l’espace de 10 mois
sera compliqué et c’est ce qui gêne le pouvoir qui s’est précipité à les tenir
quel que soit le taux de participation, sans avoir pu gagner la confiance de la
totalité du peuple Algérien. Cette confiance ne peut être atteinte, car
tous les symboles de l’ancien système, sont de nouveau de retour sur la scène
politique et compte sur cette élection pour garantir leur sécurité ainsi que
leurs présents et futurs avoirs grâce au nouvel élu. L’ancien système est
enraciné dans la société, toutes les prisons du monde ne peuvent le contenir et
il renaîtra chaque fois de ses cendres, car on ne peut pas effacer d’un coup de
baguette les 57 ans vécus par le peuple Algérien depuis la première indépendance. Pourrons-nous
accéder à notre seconde indépendance ? Tout cela dépendra du peuple et des
défenseurs de l’ancien système qui ne veulent pas lâcher prise.
Pour certains, il est possible de sortir du
cadre légal parce qu’une bonne partie du peuple veut une période de transition
qui se chargera de changer les lois sur-mesure, prescrites par l’ancien
système, avant d’aller vers l’élection. Cette façon de voir est contenu
dans les propositions du 11 mars 2019. Aujourd’hui, pendant que les
citoyens manifestent (« vendredisent »
et « mardisent ») deux fois par
semaine depuis le 22 février 2019 et que le pouvoir autiste tente pour la
troisième fois d’organiser l’élection présidentielle en Algérie, un véritable
bal de citoyens, aussi médiocre les uns que les autres se sont porté
candidat. Notre pays continue à être la risée du monde devant cet
engouement. Notre pays, terre d’un million et demi de martyrs, l’Algérie
ne mérite pas cela. Il est inquiétant de ne pas voir, pour l’heure, de
dialogue ou négociations ou de propositions sérieuses, impliquant toutes les
composantes de la société algérienne. Il nous faut une visibilité, car il
n’est pas dans l’intérêt de l’Algérie que cette situation s’éternise. Nous
ne devons pas nous entêter qui sera gagnant, le bras de fer ne sert personne,
car seule l’Algérie nous préoccupe.
Le peuple algérien qui a ébahi le monde par sa
maturité et le caractère pacifique de ses manifestations, ne mérite pas de voir
sa révolution échouer. Ma recommandation, pour résoudre la crise politique
actuelle, il faut résoudre la crise de confiance. Il faut prendre le
temps, sans s’éterniser pour autant, afin de trouver des solutions pérennes,
pour aller à des élections crédibles et transparentes. Arrêter de vous
mentir, toutes les solutions auxquelles le peuple n’adhère pas sont voués à
l’échec. Les Pinocchio auxquels le pouvoir fait appel à chaque élection,
ne font que compliquer la situation et portent un coup fatal à toute
élection. L’Algérien, lambda, est vacciné depuis longtemps contre toutes
ces méthodes qui l’ont poussé à boycotter les anciennes élections mais,
aujourd’hui il est décidé à se battre jusqu’à la fin pour défendre ses droits
et veut que pour la première fois élire son président, mais suivant ses
conditions et dans la transparence. Un conflit de génération politique est
en train de voir le jour en Algérie, car même la constitution actuelle refuse à
un Algérien de moins de 40 ans d’être candidat (alors que leur nombre
représente plus de 60 % de la population). L’élection imposée du 12
décembre est une vraie aventure et risque d’être un grand fiasco, qui divisera
encore plus les citoyens et fera basculer le pays dans l’impasse, car après 8
mois de protestations et arriver à un faible taux de participation, sera une
grande catastrophe sur tous les plans pour le pays. Le pouvoir est en
train d’hypothéquer l’avenir des Algériens en imposant cette élection. Les
élections ne se font pas sans le peuple. Si le peuple n’adhère pas à ces
élections, l’Algérie perdra sa crédibilité internationale et
nationale. Son unité dépendra aussi de la réussite de l’élection
présidentielle alors avant d’y aller étudions tous les garants de sa
réussite. Des négociations avec le peuple s’imposent, sinon c’est une
aventure et personne n’a le droit de jouer avec l’avenir d’un pays. Qu’il soit
dans le pouvoir ou dans l’opposition, l’Algérie est un trait rouge à ne pas
atteindre. Le rêve de devenir président est permis, mais oser se présenter sans
programme, ni personnalité militante ni bagage politique et inconnu sur la
scène nationale n’est pas un signe de démocratie pour le pays, mais plutôt
d’insulte à celle-ci. On ne peut pas du jour au lendemain devenir
président de la République. Il faut réunir quelques conditions
indispensables dans le but de devenir le futur président de la République et de
disposer d’un solide bagage intellectuel et d’un diplôme afin de se présenter
aux élections présidentielles. Plusieurs études permettent d’accéder à la
fonction suprême de chef de l’État. Mais la réalité est autre dans notre
pays. C’est un vrai spectacle de cirque avec une scène de clown auquel ont
eu droit les Algériens.
Dès l’annonce, le 22 septembre 2019, c’est une
ruée de prétendants de tout profil. Chômeur, fonctionnaire, cadre,
commerçant, ingénieur, président de partis sans adhérents, entrepreneurs…, soit
au total, plus de 50 prétendants à la candidature de président de la
République, seulement trois jours après se sont déclarés. Cet engouement
de n’importe qui vers la présidence est un autre moyen de pousser les quelques
nationalistes qui restent dans le pays, à le quitter, car le changement n’aura
pas lieu. Tous les optimistes de l’élection de 2019 pour une Algérie
nouvelle, ouverte, riche, démocratique, contre le régionalisme, de rupture avec
les méthodes du passé sans l’oublier, forte économiquement et politiquement
commence à en douter fortement. L’Etat de droit n’est pas pour
demain. Une question reste posée, qui est derrière ce scénario ridicule
et pourquoi ? Par respect au
peuple, les chaînes de télévision pourraient se passer de présenter ces pitres,
futurs au moins jusqu’au jour où ils auront réuni les 50 000 signatures. On n’a
pas le droit d’insulter un processus électoral, même lorsqu’on est contre.
L’élection présidentielle est le processus suprême qui doit être respecté par
la crédibilité et la notoriété des futurs représentants du peuple. 99 % des
postulants ne peuvent réunir 1 000 signatures, alors pourquoi accepter ce
scénario ridicule et de qui se moque-t-on. Ce n’est pas en distribuant à tout
le monde des formulaires qu’on peut convaincre la population de la transparence
de l’élection, le peuple n’est pas dupe.
« Vous pouvez tromper quelques personnes tout le temps. Vous pouvez tromper tout le monde un certain temps. Mais vous ne pouvez tromper tout le monde tout le temps. »Abraham Lincoln
HAKEM BACHIR
92 PERSONNES POURSUIVIES EN JUSTICE POUR LEUR ENGAGEMENT EN FAVEUR DU HIRAK
24 Septembre, 2019 10:00
Younes Saâdi
https://maghrebemergent.info
Photo: Bouzid Ichalalen : Interligne Algérie
92 personnes sont poursuivies en justice en raison de leur engagement politique en faveur du Hirak, et environ 40 d’entre elles, sont placées en détention provisoire, a-t-on appris du militant des droits de l’homme, Salah Eddine Sidhoum.
« J’ai une liste de 92 personnes poursuivies en justice en raison de leurs activités en faveur du soulèvement populaire contre le pouvoir. Je suis entrain de vérifier la liste cas par cas afin de constituer un rapport fiable sur les cas de personnes poursuivies », a-t-il déclaré. Il précise : « Sur les 92 personnes poursuivies 40 sont placées en détention provisoire et attendent toujours la date de leur procès ».
Atteinte aux corps constitués, atteinte à l’unité nationale et atteinte au moral de l’Armée sont les principales chefs d’inculpations pour lesquelles sont poursuivies. Des accusations purement politiques, estime notre interlocuteur.
Les personnes poursuivies sont issues principalement d’Alger, de Bejaia, de Tizi Ouzou, de Batna et Relizaine. « Ces 92 personnes poursuivies en justice sont issues de différentes régions du pays. Nous avons des personnes issues d’Alger, de Bejaia, de Tizi Ouzou, de Constantine et Batna, de Tiaret et autres », affirme-t-il tout en précisant que cette liste demeure provisoire que les recherches sont toujours en cours. « Nous avons des cas en cours de vérification. Je peux vous citer deux cas dans la wilaya de Tlemcen », précise-t-il.
Salah Eddine Sidhoum reconnait la difficulté à récolter des informations fiables. « Il n’est pas facile d’avoir toutes les informations sur tous les cas », dit-il.
Une fois prêt, le rapport contenant toutes les informations sur les détenus et les personnes poursuivies en raison de leur engagement politique avec le Hirak, sera remis au Conseil des droits de l’homme des Nations-unis et aux ONG internationales.
Ait Benali Boubekeur
À chaque lecture du nouveau discours de Gaid Salah, plusieurs questions me taraudent l’esprit. Est-ce qu’il croit vraiment à ce qu’il dit et surtout parle-t-il de l’Algérie profonde ? Alors que le peuple algérien crie haut et fort son rejet du régime, responsable de toutes les dérives depuis l’indépendance, le chef des armées salue les composantes du régime « qui ont pu réaliser, en un laps de temps, des résultats notables, qui ont contribué à rassurer le peuple et à instaurer un climat de confiance mutuelle. »
Bien entendu, dans son esprit, le panel et le gouvernement Bedoui représentent les institutions du pays. Mais que valent ces institutions si le peuple –hormis la clientèle acquise au régime –veut s’en donner des nouvelles où, cette fois-ci, elles ne seront pas façonnées par les hommes forts du pays, mais elles devront incarner la volonté de la plus large majorité du peuple algérien. Hélas, pour discréditer les revendications légitimes du peuple algérien, il les assimile à des manœuvres de son clan rival, dont les têtes d’affiche sont emprisonnées à El Harrach.
Toutefois, en évoquant la lutte intestine au sein du régime, et notamment le différend opposant Gaid Salah au trio Saïd Bouteflika, Mohamed Mediene et Atmane Tartag, le conflit n’est pas aussi vieux que le suggère la teneur des discours du chef de l’état-major. Pour bien le situer, il remonte à fin mars 2019. Jusqu’à cette date, ils réunissaient ensemble leurs forces en vue d’empêcher toute tentative d’émancipation du peuple algérien. De la même manière, et c’est le moins que l’on puisse dire, leur différend ne concerne pas la meilleure gouvernance ou la protection des intérêts de l’Algérie, mais la préservation des intérêts privés étroits.
Cependant, comme depuis 1962, à chaque fois que le clan dominant établit sa domination sur les autres clans du pouvoir, il présente son action comme la victoire du peuple algérien. « Le peuple s’est, ainsi, rallié à son armée tel un seul homme. Cette position, marquée par la communion, la solidarité et la compréhension commune de ce qui se passe dans le pays, restera gravée dans l’histoire », peut-on lire dans le discours de Gaid Salah à la veille du 31e vendredi de contestation populaire.
De quel peuple parle-t-il ? De la minorité criante qui a servi de clientèle au régime ? C’est sans doute de celle-ci qu’il s’agit. Soutenant sans vergogne la feuille de route du chef de l’état-major –après avoir soutenu avec la même force et la même détermination le cinquième mandat –, elle se regroupe autour du panel et de sa commission « indépendante » de préparation des élections. Son but –et c’est le seul –est de perpétuer un régime suranné qui la gave à satiété.
Quant au peuple, le combat pour qu’il reprenne les rênes du pouvoir ne fait que commencer. Probablement, il est encore plus difficile qu’avant la démission de Bouteflika. Car, celui qui fixe les règles de jeu ne tolère même pas la critique. Et si quelqu’un s’aventure à le faire, il gagnera sa place d’office à la prison d’El Harrach et sera accusé de trahison et de démoralisation de l’armée. Dans le fond, nos militaires sont peut-être plus perturbés par un chef des armées qui fait de la politique que d’un politique qui fait de la politique. Mais, en dictature, le plus fort est celui qui a « raison » quand le peuple est divisé. Face à un peuple uni et pacifique, la dictature mourra un jour de ses contradictions. D’où l’intérêt de multiplier la vigilance jusqu’au départ de tous les symboles du régime et la reprise en main du processus politique par le peuple algérien souverain.