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L’URANIUM DU NIGER AU CŒUR DE LA FRANÇAFRIQUE

by Redaction LQA

Abbes Hamadene

Le coup d’état en cours au Niger qui vient s’ajouter à de nombreux autres coups d’état dans plusieurs pays de la région du Sahel (Burkina, Mali, Guinée…) ravive le vieux débat autour de la politique néocolonialiste française connue sous le nom de la Françafrique.

Un coup d’état qui va certainement bouleverser les rapports géopolitiques et géostratégiques dans cette région.

Cependant, je me garde de tout triomphalisme excessif pour le moment. L’histoire nous apprend que les coups d’état militaires sont rarement porteurs de liberté et de démocratie pour les peuples.

C’est en 1957, durant la colonisation que les techniciens du « Bureau français des recherches géologiques et minières » découvrent de l’uranium au Niger. alors qu’ils étaient en train d’ effectuer des opérations de prospection du cuivre.

Ce n’est qu’en 1968 que la France commença à exploiter les immenses mines d’uranium grâce à des accords coloniaux lui garantissant des prix dérisoires.

L’URANIUM NIGÉRIEN RESSOURCE FONDAMENTALE POUR LE NUCLÉAIRE FRANÇAIS

L’uranium est une ressource naturelle fondamentale pour le fonctionnement des centrales nucléaires françaises,

Or, la France ne possède pas d’uranium, elle importe intégralement cette ressource. Ses principaux fournisseurs sont : Le Niger, le Canada, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan.

De ce fait, le Niger représente un enjeu économique stratégique pour l’énergie et l’économie françaises même si la France a procédé à la diversification de ses fournisseurs.

L’uranium nigérien reste vital pour les besoins énergétiques de la France, le gouvernement, EDF et Orano refusent de fournir des chiffres précis, se réfugiant derrière leur supposé « caractère confidentiel », voir « secret d’état ».

Les rapports et comptes-rendus auxquels j’ai eu accès avancent des chiffres divergents concernant la part de l’uranium nigérien dans l’industrie nucléaire française : entre 17 et 35%. L’amalgame entre uranium pauvre et enrichi complique les choses.

Malgré cette opacité qui entoure l’importation de l’uranium par la France, il existe au moins 4 raisons qui confèrent au Niger une importance particulière :

1- l’uranium nigérien est directement exploité par la France, grâce à la présence d’ORANO (ex AREVA) dans ce pays depuis plus de 40 ans;

2- Le prix est très avantageux pour la France;

3- Contrairement à d’autres gros producteurs (Canada et Australie), le Niger n’interdit pas l’utilisation de son uranium dans la production d’armes nucléaires.

4- Selon l’organisme européen public « Euratom », le Niger est le premier fournisseur de l’Union européenne, avec 25 % des approvisionnements en 2021.

On lit souvent dans les rapports officiels gouvernementaux et parlementaires que le nucléaire offre à la France son “indépendance énergétique ». Soit ces rapports oublient que l’énergie nucléaire ne peut s’obtenir sans l’uranium, soit ils considèrent que le sol dont il provient, le Niger, lui appartient – et alors considère encore ce pays d’Afrique comme sa colonie.

LE NIGER : UN CAS PATENT ET FLAGRANT DE L’EXPLOITATION NÉOCOLONIALISTE

Les dispositifs de domination mis en place par la France n’ont pas écrasé de la même manière les 15 pays constituant la Françafrique. Une domination qui se présente sous forme d’une véritable cogestion à l’exemple de l’ancien président ivoirien Félix Houphouët-Boigny ou sous forme d’ingérences plus ou moins discrètes dans d’autres pays.

Mais concernant le Niger, tous les moyens sont bons pour maintenir un régime vassalisé : contre-espionnage, présence militaire…

Dès le début, le prix de l’uranium nigérien est officieusement fixé par Paris. Toute tentative, la plus timide soit-elle, visant à changer cette scandaleuse relation commerciale, coûte à son auteur des représailles.

A titre d’exemple, en 1974, Hamani Diori, le chef d’État de l’époque , est victime d’un coup d’État peu de temps après avoir eu l’audace de demander une augmentation du prix de vente de l’uranium.

MINES D’URANIUM AU NIGER : UN DÉSASTRE POUR L’ENVIRONNEMENT ET UNE CATASTROPHE SANITAIRE POUR LES NIGÉRIENS

L’extraction d’uranium pour l’industrie nucléaire engendre de sérieux problèmes de santé et produit des quantités colossales de déchets, chaque tonne d’uranium extrait engendre entre 40 à 100 tonnes de déchets radioactifs.

Ces dernières années, la société française ORANO (ex AREVA ) a fermé plusieurs mines, laissant derrière elle un vaste désastre écologique et sanitaire.

En mars 2021, après 40 ans d’exploitation de l’uranium, AREVA a procédé à la fermeture de plusieurs mines dans la région d’Arlit (nord du Niger ) laissant derrière elle un héritage empoisonné. Il s’agit de 20 millions de tonnes de boues rétroactives et résidus d’extraction de l’uranium (450 000 becquerels par kilogramme).

Ces boues émettent du gaz radon et vont continuer à émettre de la radioactivité pendant des centaines de milliers de siècles.

La société française aurait du les stocker sur un site qui garantit leur confinement dans le long terme. Mais cela aurait coûté de l’argent et baissé les profits de la société française .

La rentabilité financière pour ORANO est plus importante que la vie de plusieurs générations de nigériens exposés à toutes sortes de maladies (notamment le cancer).

En parlant des conséquences de l’extraction de l’uranium, nous ne pouvons pas oublier la surexploitation des nappes phréatiques pour traiter les minerais, dans une région où cette ressource manque cruellement.

Si les responsabilités présentes et futures incombent singulièrement à l’état français, il y a lieu de rendre hommages aux dizaines de milliers de militants français (antinucléaires, écologistes, anticolonialistes ) pour leur combat contre l’exploitation désastreuse de l’uranium au Niger.

Il faut rendre également hommage aux ONG françaises qui mènent ce même combat avec acharnement et détermination, à l’exemple de

« L’Observatoire du nucléaire », « le réseau sortir du nucléaire », La CRIIRAD ( Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité ) et bien d’autres associations et organismes indépendants de l’état.

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