N’OUBLIONS PAS L’ESSENTIEL !

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Hacène LOUCIF

Le devoir de vérité n’aime pas les détours. Alors, allons droit au but. Le 09 février dernier, 16 ou 17 manifestants (certaines informations en évoque une vingtaine), arrêtés lors du Vendredi 48 de La Silmiya étaient sur le banc des accusés au tribunal de Sidi M’hamed.

Dans un plaidoyer qui marquera, certainement, l’histoire de notre pays et, spécialement, celle de la justice, le jeune vice-procureur, Sid Ahmed Belhadi, a plaidé la relaxe pour ces manifestants.

Mieux encore, il a mis le doigt sur le fait que l’indépendance de la justice est indissociable de l’achèvement du processus de l’indépendance du pays par la libération des institutions de l’Etat du joug de la junte militaire et le transfert de la souveraineté vers le peuple.

« Les Algériens marchent d’un pied ferme vers l’Algérie nouvelle, une Algérie où la justice sera libre et indépendante. Les Algériens scandent des slogans réclamant une justice libre et indépendante. Pour cela, j’assume mes responsabilités en tant que représentant du parquet. En concrétisation du principe de l’indépendance de la justice, et pour qu’on ne dise pas qu’on fonctionne avec les injonctions d’en haut, le parquet demande la relaxe. » a-t-il, en effet, déclaré.

Prenant connaissance de ces faits, j’ai publié, sur ma page Facebook un billet intitulé  » Le Mirage mortel ». Par la suite, mon frère de combat, le Dr Salah-Eddine Sidhoum, a eu l’amabilité de le reprendre sur Le Quotidien d’Algérie. Je lui en suis reconnaissant, d’autant plus qu’il a attiré mon attention sur les mesures punitives prises à l’encontre du vice-procureur en question.

Dans mon billet, il est vrai, j’avais interprété les faits sous l’angle d’une nouvelle trouvaille du régime. Pour moi, il s’agissait d' »ériger un procureur de la République en héros qui plaide la cause des détenus d’opinion. » Cela dit, tout de suite après, j’avais précisé que mon propos ne visait pas à « remettre en question la sincérité du représentant du parquet ».

Aussi, j’y ai émis l’hypothèse qu’à travers sa plaidoirie, le procureur se soit mis en danger.

Après sa mutation au Tribunal de Guemmar à Oued Souf, dans le sud du pays, il paraît clair que le vice-procureur Sid Ahmed Belhadi a, d’une part, pris ses responsabilités en son âme et conscience et, surtout, en parfaite connaissance de la triste réalité de la justice algérienne qui demeure au service de la junte militaire. D’autre part, cette dernière lui a rendu la pareille en montrant qu’elle ne tolère aucune voie discordante émanant de ses rangs.

En ces conditions, tout être conscient et épris de justice a le devoir d’être solidaire avec le vice-procureur Sid Ahmed Belhadi et sa famille.

Ne cherchant pas à me justifier, je présente mes excuses à cet honorable représentant du parquet, à sa famille, à toutes celles et à tous ceux qui ont pris de leur temps pour lire mon billet, pour toute approximation de ma part, dans la lecture de la séquence évoquée plus haut.

LE SYNDROME DU COLONISE ET LA HAINE DU PAYS.

Abordons, maintenant, le fond du problème que pose la sanction infligée au vice-procureur concerné.

Pour avoir plaidé la relaxe de manifestants injustement arrêtés et l’indépendance de la justice telle que revendiquée par le peuple algérien, il a été muté dans un tribunal du sud.

Dans cette histoire, comme l’a pertinemment relevé le militant démocrate et l’analyste politique Djamel Zenati via un poste sur son Facebook, « le scandale dans la mutation du magistrat de Sidi Mhamed c’est moins la sanction que l’idée que se fait le régime en place du Sud algérien. »

Poussons l’analyse un peu plus loin : le régime considère le sud du pays comme une sous-région. Pire encore, il voit en ce territoire immense une sorte de cadre carcéral à ciel ouvert. Au sein de l’armée ou dans l’administration, il est de mauvaise coutume de muter les fautifs dans le sud.

Pire encore, des camps de concentration, hérités de l’ère coloniale, implantés dans le désert algérien ont déjà abrité des détenus politiques.

Des régions entières, à l’exemple de celle où se dresse majestueusement la montagne d’In Ekker, sont, à ce jour, radioactives à cause des essais nucléaires français.

Pour rappel, certains de ces essais ont été effectués dans le secret des raisons d’Etat durant l’ère dictatoriale de Houari Boumediène.

Nos sœurs et nos frères du sud souffrent de la condition de sous-indigènes dans laquelle ils sont confinés.

Par contre, les richesses du sous-sol, intéressent au plus haut point les prédateurs du régime, ceux des multinationales et de la géopolitique néocolonialiste.

L’extraction du gaz de schiste par fracturation hydraulique peut-être interdite en Grande-Bretagne, en Allemagne, en France et dans beaucoup d’autres « Démocraties ». Elle peut même être un instrument de crimes écologiques, comme c’est le cas aux Etats-Unis. Il y aura toujours un Abdelmadjid Tebboune ou un autre pour nous vanter ses mérites. Que la plus grande réserve d’eau douce au monde en soit irréversiblement polluée, ce problème n’est pas celui de la junte militaire.

Pourtant, l’eau est désormais au centre des visées géopolitiques de domination. Ce problème, non plus, n’est celui du régime.

L’avenir de nos enfants ? Il n’en a cure !

Ces portes-galons de la junte militaires souffrent-ils du syndrome du colonisé au point de vouer une haine viscérale à leur propre pays ? Tout porte à le croire !

Mais, de grâce, ce pays, quel mal leur a-t-il fait pour qu’il mérite toute cette haine de leur part ? Pourquoi veulent-ils lui faire mal jusqu’au plus profond de ses profondeurs ?

RÉPRIMER ET DÉSORIENTER…

Alors qu’à Ain Temouchent, 30 détenus d’opinion ont été relaxés, d’autres détenus politiques et d’opinion croupissent encore en prison.

Hier encore (12 février), le photographe Senous Youcef a été arrêté par la police à Tlemcen.

Au tribunal militaire où elle ne devait absolument pas s’y trouver,, Louisa Hanoune a été libérée, tant dis que Said Bouteflika, le général Tewfik et le Général Athmane Tartag ont écopé de 15 ans de prison.

Dans ce tourbillon, Anis Rahmani, le directeur du groupe médiatique « Ennahar » a été arrêté par la gendarmerie nationale. A la brigade de Bab Jdid, il est interrogé pour les chefs d’inculpation de « trafic d’influence, obtentions d’indus avantages, non-respect de la loi sur le mouvement des capitaux de et vers l’étranger. »

Pourtant, l’agent Anis Rahmani n’est plus à présenter. Ces accointances avec les services américains et émiratis sont un secret de polichinelle.

Le journalisme de la danse du ventre qu’il exerce lui a déjà claqué à la figure. En décembre 2019,lui et l’un de ses employés, Ahmed Hafsi, ont été condamnés à six mois de prison ferme par le tribunal de Bir Mourad Raïs pour  » offense et diffamation  » à l’encontre du général Hocine Benhadid.

Pourquoi toute cette chouchouka ? L’exacerbation de lutte des clans à la tête de l’Etat-major militaire est un fait avéré.

Au centre de ces luttes, la chefferie de l’E-M. L’après Gaïd Salah est loin d’être un long fleuve tranquille.

Suite à sa mort mystérieuse, le général Said Chengriha a été nommé à son poste à titre intérimaire.

En d’autres termes, le poste de chef de l’E-M est toujours convoité !

En proie à sa crise propre crise de renouvellement, alors que La Silmiya est sur le point de célébrer son premier anniversaire, le régime cherche à désorienter le peuple.

Il veut, à tout prix, l’éloigner de l’essentiel de de son combat pacifique :

–  » Yetnehaw ga3 ! » (Qu’ils dégagent tous !).
–  » Dawla Madanniyya. Machi âskariyya ! ( Oui à l’Etat civil. Non au régime militaire !)
– « Istiqlal !Istiqlal ! » (Libération du peuple après l’indépendance territoriale !)
–  » Charîyya Chaâbiyya ! » (Seul le peuple est détenteur de la légitimité !)

La révolution pacifique du peuple algérien nous offre les possibilités d’ouvrir un débat serein autour d’un nouveau projet historique à offrir à notre pays. Menés par des spécialistes de chaque domaine de la vie publique et des acteurs de différents horizons de la société, il peut servir de document référentiel à un Pôle Politique National de Médiation.

Aussi, il peut faire l’objet de débats dans la rue pour qu’il soit porté par un consensus populaire.

Ainsi, il réhabilitera la puissance de la pensée politique, sa force agissante et sa capacité à permettre au pays de se donner les moyens de sortir de son impasse historique.

Restons mobilisés, nous sommes sur la bonne voie !

JOYEUX ANNIVERSAIRE A NOTRE SYLMIYA !

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